• Comment les hindous disent "oui" d'un hochement de tête? Un geste complexe, subtil. Essayez de faire vous même, impossible. Pier Paolo Pasolini a essayé de le décrire, je lui laisse la parole.

    "Au lieu de hocher la tête comme nous, ils la secouent, comme quand nous disons non: la différence de geste n'en est pas moins énorme. Leur non qui signifie oui consiste dans une ondulation de la tête (leur tête brune, dansante, avec cette peau noire qui est couleur la plus belle que puisse avoir une peau), avec tendresse, dans un geste empreint de douceur... La tête monte et baisse, comme légèrement détachée du cou, et les épaules ondulent également un peu, avec un geste de jeune fille qui vainc sa pudeur et montre effrontément son affection. Vues de loin, les foules indiennes restent gravées dans la mémoire, avec ce geste d'assentiment, et le sourire enfantin et radieux dans le regard, l'accompagnant toujours. Leur religion tient dans ce geste".


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  • Le seul moment où il n'y a pas de mendiants. Ils sont occupés à se réveiller. Des femmes accroupies font cuire des galettes dans des poêles, sur des braises entre deux briques. Ils remballent leurs affaires pour la journée en les empilant sous des bâches qu'ils entourent de ficelle. Partout le bruit des balais, chacun s'applique à déplacer la poussière sur les trottoirs, moyennant quelques roupies.

    D'autres, hommes, femmes, enfants, ramassent les ordures. Ils arrosent un peu les monticules de déchets, les ramassent à mains nues pour les mettre dans de grands sacs plastiques qu'ils emmènent sur des charrettes à bras. Dans le Forum social, une des revendications fortes était d'en finir avec le ramassage manuel des ordures. On comprend vite pourquoi !


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  • La rue n'est qu'une série de boutiques étroites, toutes ont une petite mezzanine qui sert de couchette. Dans l'une, des ouvriers, assis sur des sacs de plâtre, puis un Tea shop, un Fresh Chicken center avec ses cages à poulets, des repasseurs, des tailleurs, un matelassier. Une famille est devant la télé, un homme, accoudé à l'extérieur, la regarde par la fenêtre. La rue débouche sur le marché, en plein air, dans un dédale de ruelles. Moins de bruit qu'ailleurs, peu de voitures peuvent passer. Couleurs, odeurs des fruits et légumes, bien rangés en pyramides luisantes dans des paniers ronds. Petites aubergines, melons, carottes rouge foncé, papayes, herbes, épices, riz, poissons frais. Odeur épicée de la friture vendue par les marchands des rues. Lanternes à gaz allumées sur chaque chariot. Un barbier, une mosquée, des bijoutiers regroupés dans une ruelle, un marchand d'échelles et d'échafaudages de bambou. Au fond d'une cour, de la musique, des enfants dansent en poussant des cris de joie. Ils éclatent de rire en me voyant.

    Tout à coup, on est pris à la gorge par l'odeur âcre, bien reconnaissable d'un bidonville, imbriqué dans le marché. Sans transition, la boue, les enfants endormis par terre, les femmes errantes.


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  • C'est l'heure où les bidonvilles se réveillent. Chacun vaque à sa toilette le long des voies. Ils font leurs besoins en regardant passer le train, à quelques mètres, les couilles à l'air. Les femmes font sécher le linge sur les cailloux le long des voies. D'autres font leur toilette, se frottent les gencives avec les doigts, mieux vaut ne pas regarder avec quelle eau. Des familles, groupées, prennent leur repas sur le sol, au milieu des immondices.

    De temps en temps, une lueur de fraîcheur verte, des carrés de verdure : ce sont des jardins potagers bien tenus, aménagés sur quelques mètres de large le long des voies.


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  • Des petits marchands vendent des plats en sauce sur de petits plateaux à compartiments. Les gens mangent avec les doigts, enveloppant la nourriture, de la main droite, dans des morceaux de " nan " frits. Des marchands de thé au lait, très sucré sont assaillis. Mieux vaut ne pas faire attention à l'état des récipients.

    Neuf heures : multitude de gens qui marchent dans la ville, déversés par les trains de banlieue.

    Plus tard, en fin de matinée, arrivent par le train des centaines de gamelles que se sont préparées les voyageurs de banlieue... on ne mange pas la nourriture préparée par n'importe qui, dans un pays où les castes sont si prégnantes. Mystérieux circuits, chaque gamelle, boite ou sac est numéroté. Des porteurs les chargent sur de longues palettes pour aller livrer à chacun son repas sur son lieu de travail. Comment tout cela arrive-t-il à bon port, dispersé dans la ville ? Cela fait partie du mystère indien. Peu importe, chaque jour, les gamelles rejoignent en temps voulu leurs destinataires.

    Tout à coup, panique, les marchands de friture, portant sur la tête leur plateau métallique et tout son matériel. En une minute, tous se sont volatilisés. Un camion municipal arrive, il fait la chasse aux marchands sans licence. Près d'une heure plus tard, ils n'en ont attrapé que deux ou trois, et rempli le camion de leur matériel. Un seul homme en uniforme ; les autres, en civil, ramènent ceux qu'ils ont pu capturer avec leur matériel hétéroclite. Attroupements que le policier a du mal à disperser.


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