• Dans tout le pays, et particulièrement dans les grandes villes comme Santa Cruz, Sucre et Cochabamba, ont lieu des manifestations, parfois violentes, contre les hausses des tarifs des carburants de 10 à 23% – qui touchent particulièrement les plus pauvres mais devraient rapporter à l'Etat quelques 25 millions de dollars- et pour une nationalisation du gaz et du pétrole sans indemnisation.


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  • A Santa Cruz, je vais me balader (a l'ombre, 33 degrés) et je tombe sur la place centrale sur un meeting organisé par le recteur de l'université autonome, en grève de la faim avec toutes les autorités de l'université, contre la hausse des prix de l'essence et du diesel. 400 personnes, pas mal d'universitaires, des gens sur la place qui s'agglutinent. Une tente, des chaises d'université a tablettes.

    Une ambiguïté plus qu'évidente: interventions successives contre les multinationales du pétrole, pour l'unité de la Bolivie, contre le président Mesa qui est "le meilleur allié des multinationales", mais en même temps unité d'action avec l'oligarchie des entreprises de Santa Cruz, carrément à droite, et qui ne demandent qu'une chose, l'autonomie du département qui concentre à lui seul une bonne partie des ressources pétrolières du pays. Les discours des universitaires va dans le même sens, mais au nom de la nécessaire décentralisation face aux milliers de fonctionnaires qui régentent tout depuis La Paz.

    Intervention d'un dirigeant étudiant (trotskiste, et contre Mesa lui aussi): " attention, on risque de faire le jeu des entreprises qui elles pratiquent des bas salaires et ont des intentions politiques. Le recteur devrait consulter les étudiants pour parler au nom de l'université ". Le recteur, furieux, dit on n'a qu'à voter, " si vous voulez que votre recteur arrête sa grève de la faim... je la fais avec le conseil... " mais finalement ils ne répondent pas à l'étudiant.

    Un autre professeur: "il n'y a pas à consulter, il faut agir, on ne va pas tout le temps payer pour le reste du pays..." (au moins c'est clair!). "C'est bien joli, ils ont gagné à El Alto, mais les 60 millions de dollars de dédommagement à l'entreprise française, qui va les payer, c'est nous."

    Sur ce, arrive en fanfare une petite manifestation, drapeau rouge et drapeau vert et blanc en tête. Ce sont les entrepreneurs, et toutes les radios et télés se précipitent pour saisir l'embrassade historique entre le recteur et les entrepreneurs. Derrière le recteur, une effigie de Mesa que ceux-ci ont traîné par terre avec une corde.

    Discours de Franco, dirigeant des entrepreneurs de la viande, se félicitant de l'unité d'action des patrons et de l'université. Ce même dirigeant avec ses petits camarades, a augmenté le prix de la viande l'année dernière.

    Je demande a mon voisin si le recteur est de droite, il répond que non mais qu'il n'a jamais voulu se situer... Bon, maintenant c'est fait !

    Pendant ce temps, sous les arcades de l'autre coté de la place, indifférents, une vingtaine de grévistes de la faim. Si la revendication (générale) que la loi sur les hydrocarbures soit adoptée est bien présente, il y a pêle mêle des employés communaux, des sans emploi, des universitaires, avec des revendications diverses.

    Je ne verrai pas la suite, je pars en Uruguay demain. Pour l'instant ils bloquent l'entrée principale de l'aéroport, mais le microbus passe par des chemins aussi poudreux que détournés. On verra bien.


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  • Une expérience que j'ai envie de vous faire partager (pas drôle, mais ca existe):
     
    En Bolivie, à Potosi, j'ai visité une mine coopérative, où les mineurs ont des conditions de travail vraiment du 19e siècle.
    Potosi, à 4000 m d'altitude, était une ville très riche, avec des mines d'argent, au 17e siècle. Plus tard sa splendeur a chuté avec le prix du minerai d'argent. Sur la photo, c'est une procession pour l'enfant Jésus... mais les petites carrioles sont couvertes d'objets en argent: plats, fourchettes etc, en l'honneur de cet argent qui a fait la richesse de la ville... et la souffrance de son peuple. 
     
    Depuis, les mines ont en partie continué, avec aussi d'autres métaux. La montagne est devenue un gruyère, ou encore 8000 mineurs travaillent, dans plus de 150 entreprises, dont beaucoup de coopératives.
    En 400 ans, 7 à 8 millions d'ouvriers y sont morts de silicose, d'épuisement, d'accidents.
     
    Dans les coopératives, chaque ouvrier achète son matériel, y compris dynamite, détonateurs etc... au marché des mineurs. Tout ca est en vente libre, y compris aux gamins.
     
    Quand on visite, en petits groupes, on est avec les mineurs, et on passe à quatre pattes dans les boyaux suffocants et en pente qui sont leur passage normal. Au fond, une chaleur si insupportable qu'ils ne peuvent meme pas se mettre un chiffon devant la figure pour se protéger de la poussière. Si on le fait, on ne peut carrément plus respirer.
     
    Pas étonnant qu'ils soient tous à mastiquer des feuilles de coca, qui leur font comme une énorme boule sous une joue. Ils oublient la faim et la fatigue avec ça, ils utilisent par dessus une sorte d'anesthésiant, je ne sais pas ce qu'est ce produit.
     
    Depuis 4 ans, ils ont un treuil électrique qui remonte du fond des énormes sacs (200kg) remplis du minerai que les mineurs amènent dans des wagons de 2 tonnes qu'ils tirent avec des cordes et qui déraillent tout le temps. Avant, tout ca était remonté par ces couloirs étroits, à dos d'homme, par sacs de 50 kg.
     
    Espérance de vie: 45 ans, la plupart silicosés en quelques années.
     
    Comme ils sont payés à la production, certains se font aider par leurs enfants, ou les enfants d'autres mineurs. Ils sont habitués à cette idée depuis tous petits, et il n'y a pas d'autre travail. C'est comme ca qu'ils l'expriment. Beaucoup ne savent pas lire.
     
    S'ils ont un accident ou une maladie, aucune couverture, sauf pour ceux qui ont pu adhérer à la coopérative (se fait au bout de 4 ans de travail, moyennant une somme importante, donc ils sont minoritaires).
     
    Dans les entreprises privées, la situation est meilleure (couverture sociale, machines, meilleurs salaires) mais il y a peu d'emplois et ils ne veulent que des jeunes...
     
    Autre chose: pour séparer les différents métaux, ils utilisent dans un atelier de l'acide sulfurique, du cyanure et autres joyeusetés, sans protection aucune pour le personnel, et tout ca va se déverser dans une rivière qui va ensuite en Argentine... ils appellent ça le Rio Negro! Bon, enfin, une horreur.
     
     

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